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La part des aliments-ultra-transformés dans le régime, un facteur d’obésité infantile ?

D’après une étude menée dans 8 pays, les enfants consommant le plus d’aliments ultra-transformés ont des apports nutritionnels moins favorables que ceux qui en consomment le moins : densité énergétique du régime et apports en sucres libres plus élevés, moindres apports en fibres ; autant de facteurs associés à l’épidémie d’obésité.

Si le lien entre la consommation d’aliments ultra-transformés (AUT) et l’obésité a déjà été étayé par plusieurs études chez l’adulte, peu de données existent chez l’enfant. Des chercheurs ont fait l’hypothèse que les AUT pourraient contribuer à l’épidémie d’obésité infantile du fait de leur profil nutritionnel moins favorable.

Des enquêtes alimentaires dans 4 continents

Afin d’évaluer l’association entre AUT et apports nutritionnels, les chercheurs ont mené des enquêtes alimentaires dans 8 pays (Argentine, Australie, Brésil, Chili, Colombie, Etats-Unis, Mexique et Royaume-Uni), interrogeant de 1 300 à 27 000 enfants par pays. Trois groupes d’âge ont été considérés : les 2-5 ans, les 6-11 ans et les 12-19 ans (adolescents). Les auteurs ont évalué leur consommation d’AUT à partir de la classification NOVA*, ainsi que leurs apports en sucres, en fibres et la densité énergétique du régime.

La part considérable des AUT dans l’alimentation

La part des AUT dans l’apport énergétique variait fortement selon les pays. La plus faible était observée en Amérique latine, et notamment en Colombie et au Brésil, où les AUT représentaient 18 à 25 % de l’énergie ingérée, alors qu’en Australie, aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, plus de la moitié des calories consommées provenaient des AUT, un chiffre atteignant même 66 % et 68 % chez les adolescents américains et britanniques.

Les auteurs ont constaté que les enfants d’âge scolaire et les adolescents sont les plus grands consommateurs d’aliments ultra-transformés. L’apport alimentaire chez les enfants d’âge scolaire et les adolescents est déterminé par leurs besoins immédiats, et ils sont particulièrement sensibles au marketing agro-alimentaire (vulnérabilité développementale et influence de groupes). Cette perméabilité au marketing agressif des AUT, pouvant façonner leur goût et leur comportement alimentaire à court et long terme est considéré comme un facteur de risque important pour l’obésité infantile.

Des apports nutritionnels associés au risque d’obésité

Dans presque toutes les tranches d’âge et tous les pays, plus la part de l’apport énergétique représentée par les AUT était importante, moins les apports nutritionnels étaient adéquats, avec une densité énergétique et une teneur en sucres libres plus élevées, et une teneur en fibres plus faible. Ces associations étaient observées même au sein des pays où la part des AUT était la plus faible, et après ajustement sur les caractéristiques socio-démographiques des enfants.

Pour les auteurs, ces résultats pointent le profil nutritionnel défavorable des AUT, et suggèrent leur implication potentielle dans le développement de l’obésité des enfants et des adolescents, comme cela a déjà été rapporté chez l’adulte. Plusieurs mécanismes biologiques sont mentionnés pour expliquer leur lien avec le risque d’obésité, à commencer par leur richesse en sucres et en graisses et leur faible teneur en fibres ; mais aussi l’extrême palatabilité de ces aliments ; la déconstruction de la matrice alimentaire liée au degré de transformation ; l’effet de levier lié à leur plus faible teneur en protéines (entraînant une surconsommation énergétique) ; la vitesse d’ingestion (calories ingérées par minute) ; ou encore la présence d’additifs alimentaires. Autant d’éléments qui seraient impliqués dans un moindre rassasiement, un apport énergétique accru, une inflammation intestinale de bas-grade ou une prise de poids.

Ainsi, cette vaste étude montre que les AUT représentent une part importante de l’alimentation des enfants et des adolescents dans de nombreux pays, et riment avec des apports nutritionnels associés au risque d’obésité. Ces résultats viennent conforter la nécessité de politiques de santé visant à lutter contre la surconsommation d’AUT. Une démarche déjà amorcée dans plusieurs pays, dont la France qui s’était fixée pour objectif 20 % de réduction de la consommation d’AUT d’ici 2022 (PNNS 4).

 

* Système NOVA de classement des aliments selon la nature, le degré et l’objectif de leur transformation, développé par Monteira et al. (2019).

 

Source : Neri D, Steele EM, Khandpur N, Cediel G, Zapata ME, Rauber F, et al. Ultraprocessed food consumption and dietary nutrient profiles associated with obesity: A multicountry study of children and adolescents. Obes Rev 2021 Dec 9:e13387.