La metformine, un antidiabétique oral, présenterait aussi un effet préventif. Elle agirait en augmentant les taux circulant de GDF15, une hormone clé dans son action sur le poids et la balance énergétique, deux contributeurs essentiels à son action préventive.
La metformine est le traitement antidiabétique le plus prescrit dans le monde, les premières utilisations datant des années 50. Mais ce n’est que depuis 2002 que l’on a découvert son intérêt en prévention chez les sujets à haut risque de diabète (réduction du poids, de la glycémie et de l’insulinémie, et amélioration de la sensibilité à l’insuline). Un groupe de chercheurs britanniques et américains viennent de mettre en commun leurs données afin de préciser son mode d’action. Ils publient les résultats de leurs travaux dans Nature.
GDF15, chaînon manquant entre la metformine et le contrôle du poids
Plusieurs de leurs études chez l’homme et chez la souris indiquent que l’absorption de metformine est associée à une augmentation des taux circulants de GDF15 (pour Growth and Differentiation Factor 15), une hormone peptidique qui agit via son récepteur GFRAL, localisé dans le rhombencéphale. Chez l’homme, son taux circulant est multiplié par un facteur 2,5 après deux semaines de traitement à la metformine et cette augmentation est maintenue dans le temps (6, 12 et 18 mois de traitement). Chez l’homme comme chez la souris, l‘augmentation des taux circulants de GDF15 est significativement corrélée à une perte de poids. Les expérimentations chez la souris ont permis d’explorer les modalités de cette perte de poids. Dans un modèle d’obésité nutritionnelle chez la souris, le traitement par la metformine provoque une perte de poids qui est abolie lorsque l’expression de GDF15 ou de son récepteur GFRAL est invalidée. Les chercheurs notent aussi une diminution de la prise alimentaire en cas de traitement à la metformine. Enfin, des mesures de calorimétrie réalisées chez des souris traitées par antagonistes GFRAL indiquent que la dépense énergétique est augmentée sous l’action de la metformine.
Ainsi, à partir de ces données, les chercheurs démontrent le rôle joué par le peptide GDF15 et son récepteur dans la perte de poids observée en cas de traitement à la metformine et indiquent que cet effet découle à fois d’une réduction de la prise alimentaire et d’une augmentation de la dépense énergétique.
GDF15 n’est pas impliqué dans l’effet de la metformine sur l’insulinorésistance
D’autres travaux réalisés chez la souris indiquent cependant que GDF15 ne serait pas impliqué dans l’effet de la metformine sur les taux circulants d’insuline et de glucose. Toutefois, la perte de poids dépendante de GDF15, aussi observée chez l’homme, contribue probablement à l’amélioration de la sensibilité à l’insuline.
Production de GDF15 par différents tissus.
Les travaux chez l’homme et chez la souris révèlent que l’intestin grêle, le côlon et le rein expriment l’ARN messager Gdf15 et la protéine GDF15. De plus, le traitement in vitro par la metformine d’organoïdes intestinaux1 obtenus à partir de cellules humaines ou de souris provoque une augmentation de l’expression et de la sécrétion de GDF15.
Cette découverte de l’intestin comme site majeur d’expression de GDF15 sous l’effet de la metformine pourrait orienter les recherches vers des formulations de metformine ciblant spécifiquement l’intestin. En outre, comprendre le lien entre l’action de la metformine sur l’intestin et son effet antidiabétique ouvre d’autres perspectives de recherche.
Source : Anthony P. Coll, Michael Chen, Pranali Taskar et al. GDF15 mediates the effects of metformin on body weight and energy balance. Nature, 25 December 2019.
1 Les organoïdes constituent de nouveaux modèles d’organes ex vivo, à mi-chemin entre les modèles in vivo et les cultures de cellules in vitro. Ils sont obtenus à partir de cellules souches ou peu différenciées qui, dans un environnement en 3D adapté, s’auto-organisent spontanément en tissu fonctionnel.