Quels sont les effets sur le développement corporel et sur les organes d’une alimentation riche en sucre et en sel durant l’enfance ? Des expériences menées chez le rat indiquent une moindre prise de poids mais un tissu adipeux plus présent, et une altération du métabolisme adipeux.
Une alimentation déséquilibrée doublée d’une activité physique insuffisante durant l’enfance et la puberté fait le lit du surpoids, de l’obésité et de maladies non transmissibles à l’âge adulte. Si l’IMC peut être un bon indicateur du suivi de l’obésité, on sait qu’il existe des « faux maigres », présentant une obésité métabolique (avec notamment une accumulation de graisse viscérale) malgré un IMC normal. Pour mieux comprendre les effets d’une alimentation riche en sucre et en sel durant l’enfance, des chercheurs se sont penchés sur leur impact sur le développement corporel de jeunes rats, et sur d’éventuelles lésions des organes.
Moins gros mais plus gras
En pratique, de jeunes rats mâles juste sevrés (21 jours) ont été divisés en deux groupes :
- un groupe témoin qui a reçu un régime standard et de l’eau du robinet ;
- et un groupe expérimental nourri avec un régime standard et une boisson contenant 1,8 % de NaCl et 20 % de saccharose (au lieu de l’eau du robinet).
Après 60 jours de ce régime, les animaux ont été soumis à des tests de tolérance au glucose et à l’insuline, à une collecte d’urine et à la surveillance de la fréquence cardiaque, puis euthanasiés à 81 jours.
Résultats ? Les rats soumis au régime riche en sel et sucre mangent moins – notamment moins de protéines -, sans doute rassasiés par les glucides de leur boisson (l’eau seulement salée ne réduit pas la prise alimentaire, au regard de résultats antérieurs). Ils grossissent moins que les rats témoins (poids moindre), mais affichent ‘paradoxalement’ une adiposité supérieure, et une augmentation des tissus adipeux blanc et brun. Des niveaux accrus de PPAR (récepteur activé par les proliférateurs de peroxysomes, impliqué dans la thermogénèse) pourraient expliquer l’hypertrophie des adipocytes bruns. Si la glycémie n’est pas affectée, le régime salé/sucré induit une augmentation de la masse du foie et l’accumulation de lipides hépatiques, une hausse de la fréquence cardiaque (sans modification de la morphologie du cœur) et des dysfonctionnements rénaux.
Ainsi, un régime riche en sel/sucre semble induire, chez les jeunes rats, une obésité non visible et affecter leur développement en impactant notamment le métabolisme du tissu adipeux. La lipogénèse de novo accrue dans le foie serait en partie compensée par le métabolisme du tissu adipeux brun, protecteur. Pour les auteurs, ce modèle murin mime les « faux maigres » humains, fournissant un outil approprié pour l’étude de ces troubles métaboliques atypiques.
Source : Cavalcante KVN, Ferreira-Junior MD, Moreira MC dos S, et al. Skinny fat model of metabolic syndrome induced by a high-salt/sucrose diet in young male rats. British Journal of Nutrition. Published online 2024:1-24. doi:10.1017/S0007114524002927