L’utilisation de phytases pour libérer le phosphore séquestré dans les phytates et le rendre bioaccessible est monnaie courante dans l’alimentation des monogastriques. L’efficacité de ces enzymes permet d’obtenir des régimes quasiment dépourvus de phytates. Prochaine étape de développement : un meilleur paramétrage pour générer de vrais gains de productivité.
Quel est l’intérêt d’ajouter des enzymes à la ration alimentaire des animaux monogastriques ? À travers le cas du phosphore phytique, une revue très complète fait le point sur la question. Déterminant pour leur croissance, l’apport de phosphore aux animaux d’élevage est au cœur des enjeux de productivité. Dans les matières premières d’origine végétale utilisées en alimentation animale, il est essentiellement présent sous forme de phytates. Or cette forme de phosphore est mal absorbée par les animaux monogastriques comme le porc ou le poulet. De surcroît, les phytates eux-mêmes limitent l’absorption de certains cations comme le calcium, ou des acides aminés. Des phytases sont ainsi ajoutées au régime de ces animaux. Ces enzymes, en hydrolysant les phytates en myo-inositol et phosphates, rendent ces derniers bioaccessibles.
Sans remettre en cause l’intérêt de l’utilisation de ces enzymes, la revue s’arrête sur leurs propriétés et leurs conditions d’efficacité. Première mise au point : non, les animaux monogastriques ne sont pas dépourvus de phytases endogènes ; celles-ci existent mais seraient rendues inefficaces en cas de consommation concomitante de calcium. Les auteurs battent également en brèche l’idée simpliste d’une relation linéaire entre la teneur en phytates et l’efficacité des phytases : de nombreux autres facteurs entrent en jeu comme la source et la solubilité des phytates (par exemple, phytase très active sur la farine de soja, peu sur le riz), le ratio entre phytates et protéines, le type et la dose de phytase, le statut en vitamine D de l’animal, les caractéristiques de l’eau de boisson (température, pH), la concentration en calcium dans le régime alimentaire et les éventuelles autres enzymes ajoutées (protéases, carbohydrases). Enfin, la revue revisite le paradigme du « sans phytates » : si les phytases se montrent globalement efficaces pour hydrolyser les phytates et libérer le phosphore, cela ne se traduit pas nécessairement par un gain de productivité, qui est pourtant la finalité recherchée. Leur utilisation devrait donc être couplée à des stratégies de formulation de régimes adaptés ainsi qu’à des analyses préalables des concentrations et des sources de phytates.
Source: Phytate-free nutrition: A new paradigm in monogastric animal production. Cowieson AJ et al. Animal Feed Science and Technology; 222 (2016): 180-189.