Des travaux publiés dans Nature révèlent comme le fructose alimentaire peut indirectement stimuler la croissance tumorale, via les métabolites de ce sucre produits au niveau hépatique.
Des chercheurs américains viennent de publier dans Nature les résultats de leurs travaux montrant comment le fructose alimentaire – dont la consommation n’a cessé de croître au cours des dernières décennies, en lien avec l’utilisation de sirop de maïs à haute teneur en fructose comme ingrédient sucrant dans de nombreux produits, et en particulier dans les sodas et autres boissons sucrées – stimulerait la croissance tumorale. Les données pointent un mécanisme indirect faisant intervenir des métabolites du fructose produits au niveau hépatique. A travers une première série d’expériences sur différents modèles animaux porteurs de tumeurs, les chercheurs montrent que l’introduction de fructose dans le régime alimentaire conduit bien à une accélération de la croissance tumorale. Or, le métabolisme du fructose, observé in vitro, s’avère très limité dans les cellules cancéreuses utilisées dans ces modèles. En cause : l’absence d’une enzyme, la kéto-hexokinase C (ou KHK-C, une enzyme qui convertit le fructose en fructose-1-phosphate) dans les lignées de cellules cancéreuses étudiées. La prolifération cellulaire ne résulte donc pas de la métabolisation directe du fructose par les cellules cancéreuses.
Les métabolites hépatiques du fructose, substrats des cellules cancéreuses
Dans l’organisme, seuls quelques types de cellules non malignes expriment l’enzyme KHK-C nécessaire au métabolisme du fructose, dont les hépatocytes. Confirmant l’implication de ces derniers, les chercheurs montrent qu’associer des hépatocytes à des cellules cancéreuses mises en culture avec du fructose suffit à stimuler leur prolifération. Ce sont donc des métabolites du fructose produits par les hépatocytes qui « nourriraient » les cellules cancéreuses. Parmi les candidats possibles, les travaux des chercheurs pointent les lysophosphatidylcholines (LPCs) : in vitro, ils sont fortement consommés par les cellules cancéreuses ; in vivo, ils connaissent une très nette augmentation en cas de régime enrichi en sirop de fructose et stimulent la croissance tumorale quand on en administre à des souris. Comme en témoignent une dernière série d’expériences utilisant des traceurs isotopiques, les LPCs serviraient notamment à la fabrication de phosphatidylcholine, un phospholipide présent dans les membranes cellulaires, nécessaire à la prolifération tumorale.
Source : Fowle-Grider R, Rowles JL 3rd, Shen I, Wang Y, Schwaiger-Haber M, Dunham AJ, Jayachandran K, Inkman M, Zahner M, Naser FJ, Jackstadt MM, Spalding JL, Chiang S, McCommis KS, Dolle RE, Kramer ET, Zimmerman SM, Souroullas GP, Finck BN, Shriver LP, Kaufman CK, Schwarz JK, Zhang J, Patti GJ. Dietary fructose enhances tumour growth indirectly via interorgan lipid transfer. Nature. 2024 Dec;636(8043):737-744. doi: 10.1038/s41586-024-08258-3.