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Brève – L’étiquetage épicurien : le plaisir des sens au service de portions plus raisonnables

Mettre l’emphase sur les dimensions sensorielles des aliments, afin d’encourager leur consommation modérée : tel est le principe de « l’étiquetage épicurien » proposé par deux chercheurs spécialistes du comportement alimentaire. Si le principe semble contre-intuitif, les premiers résultats suggèrent qu’il pourrait pourtant fonctionner, notamment chez les consommateurs français, tournés vers le plaisir alimentaire.

 

« Pâte croustillante garnie d’une élégante crème au citron, légèrement acidulée » pour décrire une tarte au citron ; « Soufflés de gnocchis, dorés dans une noisette de beurre & sa persillade » pour décrire une poêlée de gnocchis… Et si des descriptifs mettant l’accent sur les propriétés sensorielles des aliments nous conduisaient, contre toute attente, à choisir des tailles de portion plus raisonnables ? C’est là tout le concept « d’étiquetage épicurien » développé et testé par Pierre Chandon et Yann Cornil dans une série d’études publiées dans Appetite.

De moindre quantités commandées

Les chercheurs montrent ainsi que des consommateurs exposés à un menu présentant un étiquetage épicurien commandent des quantités moindres d’aliments au restaurant et les savourent davantage (rythme d’ingestion plus lent), et leur attribuent une valeur monétaire supérieure à celle du menu standard (avec un étiquetage classique). À noter, si l’étiquetage nutritionnel des calories et matières grasses conduit aussi à une réduction des quantités commandées, il tend à diminuer la valeur monétaire attribuée au menu.

Un effet culture-dépendant ?

Les auteurs suggèrent que l’effet de l’étiquetage épicurien pourrait toutefois varier selon les cultures alimentaires, et agir davantage chez des consommateurs français qu’américains1. L’analyse de plus de 9 000 aliments vendus dans les supermarchés des deux pays corrobore cette hypothèse, avec un étiquetage épicurien plus prévalent en France, pour des produits généralement présentés dans emballages contenant des portions plus petites.

Ainsi, alors que plaisir et santé sont encore trop souvent présentés comme des objectifs incompatibles en nutrition, ils pourraient ressortir tous deux gagnants en cas d’étiquetage épicurien. Sans oublier que ce dernier pourrait aussi susciter l’adhésion de l’industrie, si l’augmentation de valeur qu’il semble induire (malgré des produits de plus petite taille) se confirmait. Affaire et publications à suivre !

 

Source : Chandon P, Cornil Y. More value from less food? Effects of epicurean labeling on moderate eating in the United States and in France. Appetite. 2022 Nov 1;178:106262. doi: 10.1016/j.appet.2022.106262.

1 De précédents travaux ayant déjà montré les conceptions diamétralement opposées du « bien manger » entre ces deux pays, plus tourné vers le plaisir en France et vers la santé aux Etats-Unis.