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Avis de décès du Professeur Marian APFELBAUM

La SFN a le regret de vous faire part du décès du Pr Marian Apfelbaum, survenu le 16 mars 2020 à l’âge de 89 ans.
Il était une personnalité  importante de la SNDLF du temps du Pr Trémolières et a soutenu la création de la SFN issue de la fusion de la SNDLF avec l’AFN. Il a toujours été un participant actif de la SFN. D’anciens membres de son service et de son laboratoire à l’Hopital Bichat ont rédigés un texte dans lequel beaucoup d’entre nous qui ont travaillé avec lui (P. Sérog, A.Quignard-Boulangé) ont retrouvé le rôle que ce médecin et chercheur a joué dans la nutrition. Le texte ci-dessous résume sa carrière :

Il a été le plus éminent des pionniers de la Nutrition humaine en France. Il en a fait une spécialité médicale reconnue au niveau Universitaire (section 44-04).

Marian Apfelbaum est né à Varsovie le 26 juin 1931 où son père était médecin Chef de service de l’hôpital du Ghetto, dans lequel toute la famille fut enfermée. Toute la famille, à l’exception de sa sœur, s’échappera du Ghetto début 1943.

Arrivé en France en 1946, il fait ses études au Lycée Louis-le-Grand puis à la Faculté de médecine de Paris.

Docteur en médecine en 1961, il est nommé assistant de physiologie en 1962 dans l’Unité INSERM N° 1 (1960-1976, Professeur Jean Trémolières). Licencié es sciences, assistant des Hôpitaux-Assistant des Universités en 1966, il est nommé Professeur agrégé de Physiologie, médecin des Hôpitaux en 1971.

Il crée l’Unité INSERM N° 286 (Nutrition Humaine) en 1984, qu’il dirigera jusqu’en 1997, au moment de son départ à la retraite.

Il change de section et devient Professeur de Nutrition en 1988, au moment de la création de la spécialité, création dont il a été l’initiateur. Il dirigera la sous-section 44-04 jusqu’à son départ à la retraite. Il fut un grand promoteur de la défense de la place de la nutrition dans les études de médecine.

Il ouvre à l’hôpital Bichat un Service de Nutrition original au sein duquel il développera les explorations fonctionnelles métaboliques et les mesures de composition corporelle (impédancemétrie), un laboratoire de lipidologie avec un volant génétique couplé à l’Unité INSERM, et une activité ambulatoire d’éducation thérapeutique sur l’alimentation en développant le concept « d’alimentation positive ». Une des premières consultations de nutrition sera ouverte à l’hôpital Bichat à cette époque.

Il travaille alors sur l’adaptation métabolique en particulier au jeûne, aux restrictions alimentaires sévères et développe une approche thérapeutique de l’obésité par les diètes protéiques qui visent à épargner la masse musculaire au cours de l’amaigrissement. Il s’intéresse aux aspects métaboliques adaptatifs à la dénutrition dans les Troubles des Conduites alimentaires et en particulier dans l’anorexie mentale, posant ainsi les bases d’un pont entre la médecine somatique et la psychiatrie dans cette pathologie.

Marian Apfelbaum était un homme affable d’une grande culture, passionné de musique et de lecture. Esprit brillant, à l’intelligence lumineuse, c’était un excellent communiquant et un redoutable débateur, maniant volontiers l’ironie et la dérision. Au quotidien, respectueux de ses collaborateurs, il leur laissait toute liberté de développer les thématiques de recherche de leur choix, mais les « disputait » volontiers au cours des réunions de laboratoire.

Il a largement participé à hisser la Nutrition Clinique humaine à un haut niveau scientifique, comme en témoigne plus de 200 publications scientifiques référencées dans PUBMED.

Il a été membre et/ou a présidé de nombreuses commissions scientifiques (INSERM, CIDIL, Nutrition society, société de nutrition de langue française etc…). Il a également écrit plus d’une dizaine de livre sur la Nutrition, dont certains sont à visée éducationnelle et de vulgarisation des connaissances scientifiques.

A la fin de sa carrière, et au moment de sa retraite, Marian Apfelbaum est revenu sur l’histoire de la Pologne et s’est intéressé, tout aussi scientifiquement à un autre sujet qui est le rapport pendant la deuxième guerre mondiale entre les communautés juives et « non juives », notamment en Pologne et dans le Ghetto de Varsovie. Ainsi naquit « retour sur le Ghetto de Varsovie » (2002), livre qui a pu voir le jour grâce à l’ouverture publique des archives du Ghetto (1991). Sa préférence pour les preuves plutôt que les témoignages l’a conduit à une relecture des archives, long travail pour lequel il a été aidé par une jeune historienne polonaise (Sylvia Szymanska). Il montre comment la population est progressivement passée de la passivité à la résistance, comment certaines personnes ont pu être de véritable héros de la guerre ayant défendu les communautés juives, tout en étant devenus des antisémites pathologiques dans le même temps.

Marian Apfelbaum dira lui-même de ses écrits : « conscient du caractère iconoclaste de ce livre qui accuse de mensonge par omission, l’énorme et vénérée littérature sur l’insurrection du Ghetto… ». Son esprit brillant, sa lucidité et sa capacité de dérision ont permis d’apporter un peu de lumière sur ce sujet sur lequel il a là aussi cherché à éclairer la vérité.

Toute la communauté médicale et universitaire qui l’a connu, ainsi que tous les membres du Collège des Enseignants de Nutrition et les représentants de la sous-section 44-04 du Conseil national des Universités, s’associent à la peine de la famille et plus particulièrement à celle de Laurence son épouse et de ses quatre enfants,

Professeur Jean-Claude Melchior et Frédéric Fumeron