Une expérimentation réalisée chez le rat suggère que l’excès protéique durant la gestation ainsi que la source des protéines consommées programmeraient l’adiposité future de la progéniture femelle.
On le sait, l’exposition périnatale au régime maternel crée une empreinte épigénétique pouvant orienter le phénotype1 des individus et leur prédisposition à certaines maladies (concept du DOHaD, pour Developmental Origins of Health and Disease). Or, les régimes alimentaires connaissent actuellement de profondes évolutions, en particulier les consommations de protéines, tant aux niveaux quantitatifs que qualitatifs. Ces deux constats ont encouragé une équipe de chercheurs (AgroParisTech / INRAE / Université Paris-Saclay) associée à Danone Nutricia à s’interroger sur les conséquences de ces consommations protéiques sur les générations futures.
Implémentation des régimes protéiques
Pour répondre à cette problématique, des expérimentations faisant varier la consommation protéique en quantité et en qualité ont été réalisées chez le rongeur. Dans un premier temps, deux groupes de rates gestantes étaient constitués : un groupe recevant un régime hyperprotéique (47 % de l’apport énergétique) et un groupe recevant un régime normoprotéique (19 % de l’apport énergétique).
Chacun de ces groupes était ensuite scindé en trois, chaque sous-groupe recevant une source protéique spécifique : protéines de lait, protéines de dinde ou protéines de pois. Ces choix de protéines permettaient de comparer les effets de protéines animales et végétales parmi les sources protéiques actuellement les plus consommées (lait, volaille, légumineuses).
À leur naissance, les ratons femelles étaient allaités par leur mère. Toutes les mères recevaient alors un régime normoprotéique, mais la source protéique restait celle reçue durant la gestation (lait, dinde ou pois).
Enfin, après le sevrage, les ratons femelles étaient soit nourris avec un régime normoprotéique soit soumis à un régime laissé à leur choix, à composer à partir de différents aliments. Cinq coupelles étaient dans ce cas proposées : trois contenaient un régime riche en protéines de lait, de dinde ou de pois, la quatrième contenait des glucides (100 %) et la cinquième des lipides (100 %).
L’excès protéique maternel favorise l’adiposité des descendantes
Le régime riche en protéines pendant la gestation, quelle que soit la source des protéines le composant, conduisait à une augmentation de l’adiposité chez la descendance femelle adulte (+ 16 à 26 % de poids de tissu adipeux total), associée à une augmentation des taux plasmatiques de leptine à jeun. Elle induisait aussi un développement en plus grand nombre des petits adipocytes, annonçant une capacité d’expansion importante du tissu adipeux. Cette augmentation de l’adiposité était majorée lorsque la descendance avait le choix entre différents aliments après le sevrage, leur permettant ainsi d’augmenter leur consommation de lipides (de 24-27 % (en pourcentage de l’apport énergétique) au détriment des glucides (réduits de 43-48 %). À noter, les ratons femelles ne montraient pas de préférence cf. précision dans la parenthèse.
–> pour la source de protéines à laquelle ils avaient été exposés via le régime maternel en période périnatale.
La source protéique affecte la croissance pondérale
Quid de l’effet de la source de protéines consommées par les mères pendant la gestation et la lactation? Comparées aux protéines de lait, les protéines de pois et de dinde conduisaient à un moindre gain de poids chez les ratons femelles, depuis leur naissance et jusqu’à l’âge adulte.
Les chercheurs concluent que chez le rongeur, la source des protéines consommées par les mères en période périnatale affecte le poids de leur progéniture femelle et qu’un excès protéique, quelle que soit sa source, augmente son risque d’adiposité future. Le ratio protéines/glucides du régime mais aussi le profil en acides aminés essentiels des protéines pourraient jouer un rôle clé dans ce phénomène.
Source : Carlin G, Chaumontet C, Blachier F, Barbillon P, Darcel N, Delteil C, van der Beek EM, Kodde A, van de Heijning BJM, Tomé D, Davila AM. Perinatal exposure of rats to a maternal diet with varying protein quantity and quality affects the risk of overweight in female adult offspring. J Nutr Biochem. 2020 Jan 8;79:108333.
1 Ensemble des caractères apparents d’un individu.