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Consommation d’édulcorants artificiels et risque de diabète

Les édulcorants artificiels non-caloriques (NAS, Non-caloric Artificial Sweeteners) présentent un pouvoir sucrant très élevé mais ne contiennent pas de calories. L’utilisation des NAS dans l’alimentation humaine est actuellement considérée comme sûre. Mais une étude sur la souris récemment publiée dans la revue Nature indique que la consommation de NAS pourrait avoir des effets inverses aux effets recherchés, en entraînant notamment le développement d’une intolérance au glucose.

Les résultats d’études scientifiques concernant l’impact de la consommation de NAS, notamment sur le risque de diabète de type 2, sont à ce jour controversés. Leur interprétation est compliquée du fait que les NAS sont généralement consommés par des personnes présentant un syndrome métabolique.

Pour déterminer l’effet des NAS au niveau de l’homéostasie glucidique, des formulations commerciales de saccharine, sucralose ou d’aspartame (à raison de 5% d’édulcorant pour 95% de glucose) ont été ajoutées à l’eau de boisson de souris C57BL/6 minces, en comparaison à un groupe contrôle ne buvant que de l’eau seule ou additionnée de glucose ou de saccharose.

Après 11 semaines, les souris ayant consommés des NAS avaient développé une intolérance au glucose marquée (P< 0,001), la saccharine exerçant l’effet le plus prononcé. L’effet de la saccharine a donc été testé par la suite auprès de souris soumises à un régime riche en graisses afin de corroborer ces premiers résultats en situation d’obésité. Au final, l’ensemble des résultats suggèrent que les NAS causent des troubles métaboliques quels que soient le type de formulation (commerciale ou pure) et la dose testée mais également auprès de souris suivant des régimes différents et présentant un profil mince ou obèse.

L’analyse de la composition du microbiote fécal des différents groupes de souris par séquençage de leurs gènes de l’ARN ribosomique 16S montre que la consommation de saccharine module la composition et le fonctionnement du microbiote intestinal induisant une dysbiose concomitante à un profil d’intolérance au glucose chez l’hôte.

L’antibiothérapie à large spectre (ciprofloxacine-métronidazole, ou vancomycine) abolissait l’intolérance au glucose induite par les édulcorants. Le transfert du microbiote des souris traitées par édulcorants à des souris axéniques les rendaient intolérantes au glucose en 6 jours, ce qui était aussi obtenu en traitant des souris axéniques avec des selles directement cultivées en présence de saccharine pendant 10 jours. La surreprésentation de bactéroïdes (entre autres) sous saccharine peut entrainer une dégradation accrue des glycanes en acides gras à chaines courtes qui pourraient rendre compte de ces effets métaboliques, et d’autres mécanismes sont possibles.

Quelques résultats marquants observés chez l’homme :

La relation entre la consommation de NAS à long terme et divers paramètres cliniques a été testée chez l’homme sur la base d’un questionnaire complété par 381 sujets non diabétiques). Des corrélations significatives entre la consommation de NAS et plusieurs paramètres cliniques liés au syndrome métabolique ont été révélées.

Une étude d’intervention à court-terme auprès de sept jeunes volontaires sains a également été menée. Pendant une semaine, les participants ont consommé la valeur maximale de la dose journalière admissible (DJA) de saccharine autorisée aux Etats-Unis, avec chez quatre d’entre eux une altération de l’intolérance au glucose qui suggère une réponse « personnalisée » aux NAS chez l’homme, découlant peut-être de différences dans la composition de leur microbiote intestinal.

La sécurité d’emploi des édulcorants est régulièrement remise en question. Les conclusions de cet article suggèrent vivement de réévaluer l’innocuité de la consommation des NAS concernant l’impact sur la tolérance au glucose. Contrairement aux doses testées dans cette étude (valeur maximale de la dose journalière admissible), la saccharine est employée à faibles doses par l’industrie agroalimentaire, associée à d’autres édulcorants. Les effets de la saccharine sont-ils transposables aux édulcorants plus utilisés, et à plus faibles doses ?

Les données actuelles chez l’homme sont très fragiles, mais elles seront indispensables pour juger de la pertinence de cette information, les données obtenues chez l’animal n’étant pas extrapolables à l’homme.

Source: Artificial sweeteners induce glucose intolerance by altering the gut microbiota.  Suez J. et al. Nature 2014 Oct 9;514(7521):181-6.

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