Une exposition périnatale à de faibles doses de bisphénol A (BPA) pourrait augmenter le risque de développer une intolérance alimentaire à l’âge adulte. Ces résultats confortent la décision des pouvoirs publics français d’interdire l’utilisation du BPA dans les contenants alimentaires destinés aux nourrissons dès 2013 et pour tous les emballages alimentaires à compter du 1er juillet 2015.
L’augmentation récente de la prévalence des allergies et intolérances alimentaires serait en partie expliquée par des modifications environnementales. Le bisphénol A (BPA), substance chimique principalement utilisée pour la fabrication de plastiques et résines, pourrait notamment compter parmi les facteurs de risque de développement d’allergies et d’intolérances alimentaires.
Cette étude avait pour but d’évaluer les effets de l’exposition périnatale à de faibles doses de BPA sur la réponse immunitaire spécifique à l’antigène d’une protéine du blanc d’œuf, l’ovalbumine (OVA), à l’âge adulte. Des rates ont été exposées quotidiennement par voie orale au BPA, à différentes doses (0,5, 5 et 50 microg/kg de poids corporel – pc), depuis la gestation jusqu’au sevrage des nouveau-nés à 21 jours. Un groupe témoin n’avait pas été exposé au BPA. Les nouveaux-nés ont ensuite été étudiés à l’âge adulte, soit à 45 jours.
D’une part, la réaction du système immunitaire humoral et cellulaire dirigée contre l’OVA était évaluée dans un protocole combinant un test de tolérance orale (gavage) et une immunisation par injection sous-cutanée d’OVA. L’exposition au BPA était associée à une augmentation significative des IgG anti-OVA plasmatiques. Cette exposition induisait également une plus forte activation de sous-populations de lymphocytes T CD4+ au niveau de la rate. Le groupe témoin non exposé au BPA ne présentait pas cette réponse immunitaire dirigée contre l’OVA.
D’autre part, l’administration orale répétée d’OVA (à 5 reprises, tous les 2 jours) chez les nouveaux-nés ayant eu une exposition périnatale au BPA induisait une inflammation du côlon avec augmentation de l’infiltration des neutrophiles. Lorsque les rats étaient soumis à un protocole préalable de tolérisation à l’OVA (i.e. ingestion orale d’OVA préalable à l’immunisation systémique), l’exposition au BPA était associée à une augmentation de la sécrétion d’IFN-gamma par les cellules spléniques in vitro.
Les résultats révèlent une relation non linéaire entre les doses de BPA testées et les effets indésirables observés, les perturbations les plus importantes ayant été observées à la dose de 5microg/kg pc/jour.
Les auteurs concluent que l’exposition périnatale à faibles doses au BPA affecte les réactions immunitaires tard dans la vie et prédispose à une intolérance alimentaire à l’âge adulte. En janvier 2014, l’Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA) a présenté la seconde partie du projet d’avis portant sur les risques pour la santé humaine associés à l’exposition au BPA. Dans ce projet, l’EFSA recommande que la dose journalière tolérable (DJT) actuelle soit abaissée, de son niveau actuel de 50 microg/kg pc/jour à un niveau de 5 microg/kg pc/jour. Toutefois, l’EFSA a conclu que le BPA présentait un risque faible pour les consommateurs étant donné que l’exposition à la substance chimique se situe bien en dessous de la DJT proposée.
Source : Food intolerance at adulthood after perinatal exposure to the endocrine disruptor bisphenol. A. Ménard S. et al. FASEB J, published ahead of print August 1, 2014.