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Activité physique et microbiote : des effets dépendants de l’IMC ?

Alors que les effets de l’activité physique sur le microbiote ont été essentiellement explorés chez les athlètes professionnels, une équipe a changé d’angle d’étude en s’intéressant à l’activité physique du quotidien. Elle suggère que ses effets sur le microbiote dépendent de l’IMC.

Certes, de précédentes études ont montré que l’exercice physique impactait favorablement le microbiote intestinal et ses productions métaboliques d’intérêt (tels que les acides gras à chaîne courte ), mais elles ont été réalisées dans le cadre d’entraînements sportifs ou chez des athlètes professionnels. Des chercheurs ont donc souhaité explorer les effets de l’activité physique du quotidien sur le microbiote.

Durée d’activité hebdomadaire et force musculaire

Pour cela, ils ont contacté aléatoirement un millier de participants inclus dans une étude de cohorte canadienne. Parmi eux, 350 sujets (40-65 ans) ont été sélectionnés : pour être inclus dans l’étude, les sujets devaient être en bonne santé, ne pas avoir utilisé d’antibiotiques dans les trois mois précédents, être de poids normal (indice de masse corporelle (IMC) compris entre 18,5 et 24,9 kg/m²) ou en surpoids (IMC compris entre 25 et 29,9 kg/m²) mais sans obésité.

L’activité physique (incluant toutes sortes d’activités, telles que les déplacements à pied ou à vélo, les activités ménagères ou les travaux de jardin, la marche de loisir, le footing, la pratique de différents sports, etc.) des sujets était principalement évaluée en termes de durée total hebdomadaire combinant toutes les intensités via le questionnaire international IPAQ (International Physical Activity Questionnaire). La force de préhension de la main dominante (marqueur de l’état et de la force musculaire globale) était par ailleurs mesurée par dynamomètre. Quant à la composition du microbiote, elle était déterminée à partir de l’analyse de l’ARN bactérien (ARN 16 S) isolé des échantillons fécaux des participants.

La diversité du microbiote améliorée en cas d’activité modérée

Les chercheurs ont d’abord porté leur attention sur un critère considéré comme un témoin de la santé du microbiote intestinal : la diversité des espèces qu’il contient (diversité-α). Ils montrent que celle-ci est plus élevée chez les sujets ayant une durée modérée d’AP (150 à 500 min/semaine) versus faible (< 150 min/semaine), quel que soit leur IMC. Pour les chercheurs, même de petites augmentations de la durée d’AP hebdomadaires pourraient ainsi suffire à améliorer la composition du microbiote, aussi bien chez les personnes de poids normale qu’en surpoids.

Toutefois, des différences apparaissent entre individus de poids normal ou en surpoids dès lors que l’on s’intéresse à des durées d’AP hebdomadaire élevées (> 500 min/semaine) : en effet, la diversité-α du microbiote décroît dans ce cas, par rapport à une durée d’AP modérée, mais ceci uniquement chez les individus de poids normal. Les chercheurs y voient un reflet possible du stress oxydant ou de l’inflammation généré en cas d’AP intense.

Des associations favorables… essentiellement en cas d’IMC normal

Les spécificités liées à l’IMC se retrouvent aussi lorsque les chercheurs observent la composition taxonomique du microbiote, en termes de phyla ou de genres bactériens présents : ainsi, chez les individus d’IMC normal, des durées d’AP élevées (versus modérées ou faibles) vont notamment de pair avec une présence accrue d’Actinobacteria et de son genre Collinsella (avec de nombreux effets bénéfiques rapportés dans la littérature pour les deux), de Proteobacteria et de Prevotella. Aucune de ces caractéristiques n’est retrouvée chez les individus en surpoids, à l’exception d’une espèce bactérienne (Collinsella aerofaciens).

Des spécificités liées au sexe viennent s’ajouter lorsque les chercheurs considèrent non plus la durée d’AP mais la force de préhension : une présence accrue de Faecalibacterium prausnitzii (associée à des bénéfices métaboliques et anti-inflammatoires) est observée en cas de force de préhension élevée, chez les hommes de poids normal d’une part, et les femmes en surpoids d’autre part. L’échantillon étant toutefois composé essentiellement d’individus de poids normal d’une part (n=267/350) et de femmes d’autres part (n=264/350), on peut se demander si la taille des autres groupes (notamment celui des hommes en surpoids) était suffisante pour mettre en évidence des différences éventuelles.

Conscients des limites de leur étude, les chercheurs estiment qu’elle suggère néanmoins que les effets de l’AP sur le microbiote pourraient dépendre du statut pondéral des sujets.

 

Source : Shah S, Mu C, Moossavi S, Shen-Tu G, Schlicht K, Rohmann N, Geisler C, Laudes M, Franke A, Züllig T, Köfeler H, Shearer J. Physical activity-induced alterations of the gut microbiota are BMI dependent. FASEB J. 2023 Apr;37(4):e22882. doi: 10.1096/fj.202201571R.